Deux rassemblements ont fédéré, mardi soir, plusieurs dizaines de citoyens à Bergerac et Périgueux. L’expérience devrait être renouvelée
Première Nuit debout à Bergerac, mardi soir, ou les balbutiements d’une expression populaire sur le parvis de l’église Notre-Dame. Environ 90 personnes, jeunes et moins jeunes, impliquées ou pas dans la vie associative et politique, s’étaient donné rendez-vous dès 18 h 30, en opposition à la loi travail. Avec le souci de ne pas se perdre en monologues : « On va vite s’ennuyer si on se retrouve à écouter ceux qui parlent au micro. Je vois des cartons devant les magasins, allons les chercher pour s’asseoir et se réunir en commission », dit une dame.
Pierre, informaticien, la trentaine, n’est pas coutumier du genre et n’a défilé qu’une fois, « pour “Charlie Hebdo” » : « C’est un mouvement qui prend dans les grandes villes, qui est porté par les jeunes. Je suis curieux de savoir ce qui peut se dire ici, à la campagne. » D’un cercle à l’autre, il y a le besoin d’exprimer, parfois confusément, « de la colère », « l’espoir de trouver des solutions pour faire autrement », en tout cas un besoin impérieux « de se réapproprier l’espace public ».
Créer la dynamique
« J’ai senti quelque chose que je n’avais pas fait depuis longtemps : parler avec la rue », souffle Jean-Claude Bost, syndicaliste et militant Front de gauche, revigoré. Et c’est à l’abri, sur le parvis de l’église, que l’on s’attelle à faire remonter les premières « synthèses » du cru. Et toujours ce souci : « Comment occuper l’espace public dans la durée ? » Organisateur de cette première Nuit debout à travers une page Facebook et militant de longue date, Didier Bustamante n’entend pas lâcher l’affaire : « Ce mouvement, il est en train d’essaimer, pour lui donner de la force, il est important de s’inscrire dans une dynamique. »
Les uns et les autres prennent la parole. « Besoin de se connaître avant d’aller plus loin », thèmes à verser au débat, tout y passe. Il est plus de 21 heures, on s’accorde sur deux autres rendez-vous, dès ce mercredi soir et à nouveau jeudi. Même endroit. Quelqu’un s’interroge dans l’ombre du parvis, la place étant étonnamment plongée dans l’obscurité : « Je voudrais savoir si on a fait exprès de couper la lumière ? »
A Périgueux aussi
À Périgueux, plus d’une centaine de personnes étaient rassemblées place de l’Ancien-Hôtel-de-ville à l’heure où nous mettions sous presse. Nombre d’entre elles venaient d’assister à la projection, dans une salle comble de Cap Cinéma, du film « Merci patron » : « On a besoin de se retrouver physiquement, pas au travers d’écrans, d’échanger de vive voix, de se confronter à l’humain », décrit un étudiant. « On est en train de réapprendre à vivre ensemble », s’enthousiasme un quadra. « C’est impressionnant, cette aventure. »
L’envie de renouveler l’expérience est prégnante chez tous. Comme Bergerac, Périgueux est susceptible d’être le théâtre d’autres Nuits debout.
Article publié sur sudouest.fr le 13/04/2016