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Depuis plusieurs années, nous assistons à une offensive sans précédent de la droite pour organiser la mise en concurrence des établissements et augmenter le financement public des établissements privés. La liste des dispositifs accordés ou promis ces derniers mois afin d’accorder de nouveaux privilèges aux établissements privés sous contrat est impressionnante : loi Carle, puis amendement Carle, Plan Espoir banlieue, reconnaissance automatique des diplômes du Vatican, projet de loi 28-75 prévoyant l’exonération de taxe foncière des écoles privées sous contrat, défiscalisation des versements destinés à créer ou à développer des écoles privées religieuses (cadeaux fiscaux sous la forme de déductions de 66% voire 75% des versements), tout cela allant de pair avec des réductions drastiques de postes et de moyens dans l’école publique, avec pour effet voire pour but avoué ou non avoué d’organiser une hémorragie des élèves vers le secteur privé.
Les faveurs accordées aux établissements privés sont le moyen pour la droite d’installer un marché de l’éducation qui contribue à faire éclater le cadre national égalitaire de l’éducation nationale. Le recours au privé encourage les ségrégations en dynamitant la carte scolaire. Il justifie le recours croissant du public à des financements extérieurs. Bref, il préfigure la mise en concurrence d’établissements autonomes.
Pour justifier le « financement » des deux systèmes, l’école publique et l’école privée – sous contrat !-, il est souvent prétendu que les deux remplissent des missions de services publics. Faux. Seule l’école publique remplit cette mission. Seule l’école publique est laïque, contrairement au privé qui – avec la loi Debré – s’est vue garantir, même quand elle est sous contrat d’association, le maintien de son « caractère propre ». L’enseignement privé tient à cette « garantie » souvent minorée car c’est ce qui lui permet de ne remplir aucune des obligations qui s’imposent à l’école publique : dans le privé l’exclusion se fait sans obligation de re-scolariser l’élève dans un autre établissement. Certains élèves scolarisés dans le privé – et jugés moins bons – sont inscrits aux examens en candidats libres afin de ne pas faire baisser les statistiques de réussite pour le classement des établissements. L’école laïque, elle, accueille tout le monde sans condition de croyance, de ressources ni de niveau scolaire. C’est ce qui en fait un véritable service public.
Seule l’école publique est gratuite. Ce n’est pas le cas de l’école privée qui demande une contribution aux familles. Le coût d’une scolarité dans le privé, surtout dans certains établissements, ne laissent pas de doute sur la sélection par l’argent qui en découle.
Il faudrait financer à part « égales » l’enseignement public et privé ? Ce qui paraît logique de prime abord l’est beaucoup moins si on applique ce raisonnement aux transports. Imaginez qu’au même titre que l’employeur participe du financement de titre de transport, celui qui veut prendre un taxi pour s’éviter le RER aux heures de pointes se verrait rembourser la moitié de sa course ! Superbe effet d’aubaine. Et en poursuivant le raisonnement, les financements alloués au règlement des taxis – pris uniquement par ceux qui en ont les moyens – amputeront le budget des transports en commun. Personne n’accepterait cela. Et pourtant c’est ce qui se passe concernant les lycées !
En tant que collectivité territoriale en charge des lycées, les régions doivent faire face à des obligations légales : le versement d’une Dotation globale de fonctionnement des lycées (DGFL) à l’ensemble des établissements publics du secondaire afin de couvrir les frais auxquels les lycées publics doivent faire face ; le versement de deux contributions de fonctionnement versées aux établissements privés sous contrats. Ces deux contributions doivent être « calculées selon les mêmes critères que pour les classes correspondantes de l’enseignement public » (article L442-9 du Code de l’éducation). Ces contributions peuvent être majorées afin de couvrir les « charge sociales et fiscales » des personnels de droits privé ainsi que les « charges » dont les établissements publics sont dégrevés, comme si la collectivité devait payer en lieu et place des établissements privés, tout ou partie de leurs impôts locaux.
Les faits sont sans appel. Nous savons faire la démonstration que la Région Aquitaine verse plus que la loi ne lui oblige aux écoles privées..
Comment accepter de telles subventions, alors que l’école publique est aujourd’hui déshabillée et dénigrée d’autant plus que son affaiblissement ouvre la voie à une marchandisation accrue des savoirs ? La laïcité est attaquée car elle est une arme contre la domination des intérêts particuliers marchands ou religieux. Son actualité s’est élargie car la lutte contre l’intrusion religieuse doit dorénavant être menée de pair avec celle contre l’agression publicitaire à l’école, totalement incompatible avec les idéaux d’autonomie et d’esprit critique qui la fondent. La bataille pour les consciences rejoint celle pour les profits : les églises et les marques s’allient pour soustraire les jeunes esprits à l’enseignement laïc émancipateur de l’école publique. Car, comme le résumait Condorcet, le but de cette dernière est de former « des citoyens qui ne s’en laissent pas conter mais qui entendent qu’on leur rende des comptes ». Ses fins sont la formation de l’esprit critique et de la raison argumentative, l’autonomie intellectuelle, la qualification du travail, l’émancipation de la personne, l’apprentissage de la citoyenneté, la connaissance de soi et des autres. Toutes choses qui s’opposent aussi bien aux vérités révélées et donc indiscutables qu’à l’aliénation consumériste.
La défense du service public d’éducation s’inscrit dans la lutte plus large contre le consumérisme de la société, qui est un mal croissant dans notre société. Car, il remplace le lien social par le bien. Il est donc à la fois contraire à l’émancipation des personnes et à la préservation des équilibres naturels qui rendent possible la vie humaine sur notre planète.
La bataille laïque, la bataille écologique et la bataille sociale sont donc indissociablement liées.
Le groupe Front de Gauche votera donc contre cette partie des dépenses allouées aux lycées privés.